Partager ou penser aux autres, cela n’a rien d’évident pour un enfant. Il n’y a pas de recette toute faite pour qu’un enfant apprenne cela mais heureusement, certaines attitudes peuvent favoriser l’altruisme de l’enfant. Comment l’y aider dans une société qui vante la performance, le plaisir personnel, le bonheur individuel ? Quels sont les préalables indispensables pour que l’enfant ait envie de partager ? Comment l’encourager à le faire et enfin quelles actions concrètes pouvons-nous mener pour l’inciter à être généreux ? Le Réseau des Parents vous propose quelques pistes de réflexion.
Des préalables essentiels
Un apprentissage lié au développement de l’enfant
Tout petit, l’enfant est autocentré, c’est peu à peu qu’il apprend à s’ouvrir aux autres. En grandissant, il prend conscience des avantages à le faire. Dès son arrivée dans la famille, l’enfant doit partager un espace, des biens matériels, et, quand il a des frères ou des sœurs, l’attention parentale et l’amour des ses parents qu’il imagine divisé par le nombre d’enfants. Même si des études récentes ont prouvé des capacités d’altruisme chez de très jeunes enfants, ces derniers ont besoin d’apprendre que “si je prends des mains cela rend triste” et qu’à contrario “quand je donne, cela rend l’autre heureux”. On peut aider l’enfant à progresser peu à peu en lui expliquant comment faire la fois suivante : ” Quand tu lui as arraché ce jeu des mains, ton frère a été très en colère car ce jeu est à lui et il voulait y jouer, la prochaine fois, il faudra lui demander s’il accepte de le partager”.

Apprendre à écouter l’autre
Que ressent l’autre quand je donne, quand je partage ? Et quand je ne le fais pas ? Comment te sentirais-tu si on te faisait la même chose ? A ton avis, comment est-ce que ton ami s’est senti quand tu as fait cela ? Que ce soit pour du positif comme du négatif, nommer ce qui s’est passé permet de prendre conscience de ce que ressent l’autre et d’ajuster peu à peu sa manière de donner. En apprenant l’empathie à nos enfants, on leur apprend à prendre conscience des besoins des personnes autour d’eux et comment se rendre utiles auprès d’eux : “J’ai l’impression qu’en faisant cela, tu as illuminé sa journée !”.
La notion de propriété et la liberté de donner
En ayant ce dont il a besoin à la fois matériellement et affectivement, l’enfant peut développer une générosité fondée sur l’envie de donner. Je reçois et, parce que j’ai reçu, je peux donner librement le surplus. On ne peut donner quand on n’a pas reçu.
Chacun est responsable de ses affaires à la maison. Si l’on veut favoriser le partage, la règle c’est : celui auquel appartient le jeu, le vêtement, l’objets décide librement de le partager ou non. Quand on force à partager, on obtient l’effet inverse : de peur de perdre ce qui m’appartient, je garde tout pour moi. Si l’objet m’appartient, c’est à moi de décider si je le prête, le donne ou non. Pensez-y quand vous faites des tris dans les chambres de vos enfants…N’enlevez rien sans l’accord de l’enfant, quitte à faire un tas des objets pour lesquels vous aimeriez qu’il prenne le temps de réfléchir à la question. Les enfants oublient aussi parfois que lorsque l’on prête un objet, on accepte le risque que l’autre l’abime ou le casse. C’est important de le leur rappeler avant qu’ils ne prennent la décision. Quand on tient vraiment à un objet, on évite de le prêter ou alors pas dans n’importe quelles conditions. Prendre le temps d’exprimer cela clairement permet de prendre des décisions raisonnables et d’éviter les drames ensuite.
Dans notre famille, chaque enfant dispose d’une boîte avec une clé pour garder ce qui lui est particulièrement précieux et qu’il ne souhaite pas partager ni voir abimé par les autres.
Mélissa, maman de 3 enfants
Et l’amour dans tout ça ?
Un enfant qui se sentira aimé, vraiment aimé par ses parents (lire nos articles sur les conflits dans la fratrie ) aura moins de mal à partager. A l’inverse, un enfant qui aura l’impression que l’on privilégie les autres, que l’on ne passe pas assez de temps avec lui risque de développer jalousie et rancœur plutôt qu’altruisme. Quand son réservoir d’amour est rempli, il est alors plus enclin à partager librement.
Où il est question de miroir…
L’exemple n’est pas le meilleur moyen de convaincre, il est le seul.
Gandhi
L’enfant a tendance à se calquer sur les modèles autour de lui. Si son entourage est généreux de son temps, de ses biens, sait sortir se son confort personnel pour aller vers les autres, alors il le sera quand il le pourra. Et nous, parents, que véhiculons-nous dans ce domaine ?
Comment accueillons-nous un ami ? Comment réagissons-nous face à quelqu’un qui est dans le besoin ? Que faisons-nous du dernier morceau de gâteau sur lequel tout le monde louche ? Quel service rendons-nous avec discrétion ? Quand délaissons-nous nos affaires courantes, notre smartphone, pour jouer avec un petit, passer du temps avec quelqu’un qui demande notre disponibilité ?
Mon mari et moi adorons faire des surprises. Nous avons remarqué que nos enfants nous imitaient. A leur tour, ils profitent de chaque occasion qui leur est offerte !
Feriel, maman de 2 enfants

Encourager et inspirer
Montrer les avantages
On peut faire preuve de générosité à tout moment. Ainsi, on prend conscience de son existence, de ses capacités à être utile, de ses richesses personnelles. On apprend à reconnaître ses valeurs à travers le regard et la joie de l’autre. Faire preuve de générosité et d’altruisme, cela rend heureux, alors ne boudons pas notre bonheur ! La découverte du don de soi apporte une joie inégalable. Partager, c’est intégrer l’idée que seul on est moins riche qu’à plusieurs.
Accompagner sa générosité au quotidien
Faisons du service aux autres une priorité et encourageons la coopération. Incitons chacun à prendre sa part et à donner un coup de main dès que l’occasion se présente ! Prenons le temps de nommer les bienfaits des pensées et gestes altruistes qu’ont pu avoir nos enfants, n’oublions pas d’exprimer notre gratitude pour les encourager. Cela leur permet de prendre conscience qu’en donnant librement, ils grandissent !
Partager, cela peut passer par des choses toutes simples comme un sourire, un regard, un petit coup de main, un petit mot, une attention à l’autre. Montrons à nos enfants combien cela rend tout le monde heureux et ne soyons pas avares de cela.
Simon donne un bonbon rapporté de l’école à son papa : “Tiens Papa, c’est pour toi, c’est comme un médicament mais ça donne de l’amour ! Si je te le donne c’est que je t’aime beaucoup très fort !”.

S’inspirer
Lorsque nous sommes témoins d’actes généreux, nous pouvons en témoigner auprès de nos enfants, nous pouvons parler aussi ensemble de ceux dont ils sont témoins. Nous pouvons également choisir de montrer des reportages positifs, qui montrent des actes généreux, encore plus profitables s’il s’agit d’enfants comme par exemple dans le film Sur le chemin de l’école. De nombreux films présentent des histoires de générosité, de partage, de services aux autres, comme Le Grinch, Azur et Asmar, Ernest et Célestine et pour les plus grands : Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, La cité de la joie, Un monde meilleur, La vie est belle de Franck Capra. On trouve également de nombreux exemples de don de soi dans la littérature (à suivre dans notre prochain article, une sélection de livre jeunesse à partager avec vos enfants).
Cultiver le plaisir de faire plaisir
Amener l’enfant à faire l’expérience de la joie du don : le gros câlin de sa grand-mère qui a reçu une belle lettre, la joie de l’enfant avec qui il a partagé un gâteau. Proposer à l’enfant de fabriquer en cachette un cadeau et lui donner l’occasion de profiter de la joie de la surprise, d’écrire des mots doux, de faire preuve d’une délicate attention envers l’autre sont des initiatives à portée de la main.
Des points de vigilance
Quand un enfant donne “trop”…vigilance ! La grande générosité de certains peut cacher le désir d’acheter l’affection de leur entourage. Dans ce cas, il est important d’en discuter avec l’enfant pour remettre les choses à leur juste place.
En suivant le développement de l’enfant, on peut lui donner les moyens de s’intéresser à l’autre, de faire preuve de générosité autant que ses capacités le permettent. Par l’environnement et l’exemple qu’il peut lui montrer, son entourage peut lui présenter mille et une manières de donner, de partager, chacun avec sa propre personnalité.
A suivre dans notre prochain article des occasions très concrètes de mettre en oeuvre la générosité de nos enfants
Lire également un article de livres jeunesse pour accompagner nos enfants sur ce beau chemin du don qui rend heureux !