S’il y a bien une notion à laquelle on se frotte rapidement en famille, c’est celle de l’égalité et de la justice. Dès l’apparition d’un enfant puis d’un deuxième, le sens de la justice s’aiguise. Les enfants comparent, notent, font des comptes d’apothicaire pour vérifier si les décisions parentales sont justes, si l’amour et l’attention parentales sont bien partagés équitablement…Les compteurs tournent très tôt ! La famille est donc aux premières loges pour apprendre à ses membres le sens de l’égalité et de la justice. Combien de fois entendons-nous “C’est pas juste !” ? Pour autant, la justice n’est pas forcément l’égalité et la vie de famille regorge d’occasions de l’apprendre. Est-ce possible d’être égalitaire ? Est-ce même souhaitable ?
Egalité ou équité ?
Le besoin de justice en éducation est primordial. L’enfant doit pouvoir ressentir que la demande du parent le concernant est juste, que la réponse à ses besoins est juste, adaptée, que les règles ne changent pas suivant le sens du vent et l’humeur du capitaine. Ainsi il se sent rassuré, en sécurité. La fonction parentale porte en elle la nécessité de réguler l’équité au sein de la fratrie. L’équité se règle au jour le jour, à travers le quotidien de chaque famille.
La justice n’implique pas de donner la même chose à tout le monde mais de s’assurer de répondre aux besoins de chacun.”
Rick Riordin
En fonction de leur âge, les enfants de la fratrie n’ont pas les mêmes capacités, pas les mêmes libertés, pas les mêmes privilèges. Certains ont l’âge de pouvoir dormir chez des amis, les plus petits ont le droit de regarder des dessins animés. Certains sont en pleine phase de croissance et nécessitent un plat de pâtes aussi gros qu’eux tandis que d’autres auront besoin d’une petite soupe, un yaourt et une compote. Ceux qui ont très faim se resserviront, les appétits de moineaux se satisferont d’une seule tournée du plat. Au nom de l’égalité, faudrait-il donner un biberon à tous ? Permettre à tous de sortir jusqu’à minuit ? On voit bien que ces situations sont inégalitaires. Y répondre de manière juste, équitable, demande de tenir compte des besoins de chaque enfant. L’égalité réside dans le fait que chacun peut obtenir les soins dont il a besoin, mais l’équité sera de fournir à chacun ce dont il a besoin et qui ne sera pas nécessairement identique à son frère.

Pour aider les enfants à comprendre cette notion, toutes les situations du quotidien sont bonnes à prendre : il marche car c’est un grand et qu’il n’a pas besoin de poussette, le bébé ne marche pas, il a besoin d’une poussette pour avancer. Il mange des morceaux dans son assiettes avec un couteau et une fourchette, le bébé ne peut pas, il se nourrit avec un biberon, etc… Les enfants comprennent rapidement que les besoins sont différents et il ne faut pas hésiter à l’expliciter en cas de malentendu. En prenant le temps d’expliquer clairement les décisions, les parents peuvent s’épargner bien des discussions et négociations inutiles. L’enfant comprend ainsi, par sa propre expérience, les notions de justice et d’équité. Plus l’enfant est capable de comprendre ces notions, de les identifier, des les analyser, de les comprendre, mieux il peut vivre avec les autres.
Quand la rivalité s’en mêle…
Chaque enfant a besoin de sentir qu’il est spécial pour ses parents, que sa singularité, ses différences sont acceptées. En reconnaissant les caractéristiques personnelles de chacun, on peut mieux répondre à leur besoin de se sentir unique. Leurs parents les aiment de manière différente parce qu’ils sont différents. La perception de l’injustice par les enfants est d’autant plus importante quand ils se sentent en rivalité. C’est alors qu’ils sont les plus attentifs (voire pénibles…) pour vérifier si le parent a bien traité chacun de la même manière. D’où l’intérêt de prévoir des temps en solo avec chaque enfant, un temps où l’on pourra répondre à la question : “de quoi as-tu besoin pour que nous passions un bon moment ensemble ?”. Un temps où chacun pourra se sentir aimé, apprécié car unique, singulier. L’équité, c’est de les aimer autant mais de tisser un lien avec leur personnalité propre. S’attacher à ce que tous aient la même chose, en même quantité, au même moment est donc un leurre.

Quand l’un des enfants de la fratrie monopolise l’attention des parents …
C’est particulièrement difficile quand l’un des enfants a des besoins particuliers qui peuvent monopoliser attention et soins des parents. Les enfants peuvent comprendre avec leur intelligence cette situation mais en souffrir malgré tout car ils peuvent avoir le sentiment d’avoir été oubliés, de ne pas être valorisés, ils ont besoin eux aussi d’être rassurés sur l’amour parental. Le temps parental n’est pas extensible, c’est à chaque famille de trouver l’équilibre entre les besoins de chacun.
Ayant un enfant avec un TDAH qui demande beaucoup d’attention, mes deux autres enfants ont souffert de cette attention moins centrée sur eux. Pour essayer d’équilibrer les choses, je leur ai fait écrire une petite liste réaliste de choses qu’ils aimeraient faire avec nous. Nous avons institué un petit temps qui leur est réservé et nous piochons une idée dans leur liste pour passer un peu de temps avec eux.
Marine, maman de 3 enfants
Les langages de l’amour : un outil pour répondre de manière adaptée et personnalisée au besoin d’amour de nos enfants
Nos enfants sont en demande de notre temps, de notre amour, de notre attention, de notre disponibilité. A nous de voir ce dont chacun a réellement besoin et ce qui remplira le plus efficacement ce réservoir affectif. Nous vous invitons à aller regarder du côté des Langages d’amour des enfants de Gary Chapman et Ross Campbell pour découvrir la meilleure manière de communiquer votre amour à chacun de vos enfants et mieux comprendre l’expression de ce besoin chez eux. Plus les parents prennent soin du réservoir affectif de chaque enfant, plus les comptes d’apothicaires au sein de la fratrie s’amenuisent. Chacun peut alors arrêter de comparer sans cesse et apprendre à se réjouir pour l’autre.
Au delà du cercle familial
Au delà du cercle familial, les discussions que l’on peut avoir avec les enfants sur la “chance ” de l’un, la “malchance” de l’autre, les situations injustes, sont de bonnes occasions de percevoir la chance qu’il peut avoir par rapport à d’autres moins favorisés. Quand ils sont en âge de pouvoir regarder les informations, discuter de l’actualité, de nombreuses occasions sont à saisir pour parler d’égalité et de justice.
Et vous, racontez-nous de quelle manière vous aidez vos enfants à saisir ces principes de justice, d’égalité, d’équité ?
Pour aller plus loin…