Nouvelle année, nouvelles résolutions, et si dans notre famille, nous arrêtions de nous disputer, de nous chipoter, de nous taper dessus, de nous agacer ? Et si cette année devenait celle de la sérénité pour notre famille ?
Au risque de vous décevoir, une famille sans conflits, cela n’existe pas. Nous sommes tous différents, y compris au sein de la famille. Aussi, incompréhensions, frottements, décalages, agacements sont forcément au rendez-vous ! Ces conflits ont très souvent une forte charge émotionnelle. Chacun se demande si finalement il est aimé, respecté, quel pouvoir il a, s’il peut plier tout le monde à sa volonté, pourquoi il peut ou pas faire ce que font les autres, pourquoi il obtient ou non telle ou telle chose…
Le conflit est un signe de vie et de liberté au sein de nos familles. Il ne faut donc pas espérer qu’il ne se produira pas, ni même en avoir peur ! Vouloir à tout prix éviter les conflits peut paradoxalement se révéler d’une grande violence…En revanche, on peut essayer de se passer de la violence qui accompagne souvent les disputes, apprendre à reconnaître ce qui provoque les conflits, gérer ces moments de crise, maintenir les relations entre les personnes et apprendre à se réconcilier. Vivre ensemble c’est accepter qu’il y ait des heurts, des dysfonctionnements et apprendre à les gérer correctement. Vivre ensemble à condition que chacun puisse être reconnu dans sa différence, que les conflits puissent s’exprimer, pour que l’altérité ne s’estompe pas dans l’indifférence ou ne s’exacerbe pas dans la violence.

On peut comprendre le conflit de deux façons :
- négativement lorsqu’il s’accompagne de violence physique, psychologique ou verbale
- de manière constructive lorsqu’il exprime une opposition, un désaccord entre deux personnes et que cela se fait sans violence. Dans ce cas, le désaccord va permettre à chacun de mieux comprendre l’autre, sa position. La crise devient une possibilité de croissance pour chacune des parties. L’expression des divergences d’opinion est plutôt saine, car elle permet de prendre connaissance du conflit. Quand le conflit n’est pas nommé, difficile de le résoudre ! C’est pourquoi, pouvoir permettre à chacun d’exprimer ses désaccords calmement demeure primordial.
Pour y parvenir, voici quelques questions à se poser :
- Comment peut-on canaliser la violence qui nait de nos désaccords pour qu’elle soit moins destructive ?
- Comment faire en sorte de rendre ce conflit constructif, sans générer de violence ?
- Et quand il est “trop tard”, que la violence s’est installée, comment revenir à quelque chose de plus constructif, que les opinions puissent s’affronter autrement ?
La gestion des conflits au sein de la fratrie a toujours été une préoccupation et une priorité pour nous. La domination, l’accusation, la jalousie, la rivalité sont au coeur des relations entre nos enfants. Il nous est difficile de voir nos enfants s’étriper, se déchirer. C’est une vraie souffrance pour nous parents. Leur manière de gérer naturellement les conflits se fait par la force, la domination de l’un sur l’autre. Nous aimerions tellement qu’ils puissent sortir tous gagnants des conflits ! Nous essayons de semer des petites graines dans l’éducation de nos enfants pour qu’ils puisse y avoir un jour recours comme impliquer tout le monde dans les solutions, se séparer quand la colère est trop forte, laisser parler le ressenti de l’autre sans lui couper la parole, laisser chacun libre de dire pardon quand il est prêt…”
Arthur, papa de 4 enfants
Privilégier les solutions gagnant/gagnant
Des étapes pour sortir du conflit
Ce n’est pas toujours facile de faire en sorte que chacun ressorte grandit du conflit. Pour cela, vous pouvez suivre les 6 étapes proposées par Thomas Gordon :
1/ Identifier le conflit
2/ Énumérer les solutions possibles (y compris les plus farfelues, cela aura au moins le mérite de les faire rire et de détendre la situation !)
3/ Évaluer l’efficacité des solutions proposées
4/ Choisir ensemble la solutions la plus acceptable
5/ Etablir les moyens réalistes de la mettre en oeuvre
6/ Faire le bilan de la solution trouvée et changer de solution si cela n’a pas marché
On ne trouve pas forcément la solution du premier coup, dans ce cas, ça vaut le coup de perséverer et de voir aussi si certains problèmes cachés ne bloquent pas le conflit. Ne pas hésiter aussi à mettre l’enfant devant le respect de la solution trouvé et lui montrer sa désapprobation, ne pas le laisser se défiler : “Est-ce que tu voudrais bien revenir à la table afin que nous puissions trouver une solution qui convienne à chacun ?”
chez nous quand ça déborde (3 HP à la maison de 15, 12 et 9 ans), c’est conseil famille ! tous dans la même pièce (à 5) et on lâche tous les conflits et on se dit tout y compris les conflits larvés (on en prend aussi pour notre grade en passant mais c’est le jeu … nous ne sommes pas parfaits) puis, on cherche des solutions tous ensemble et cela se termine toujours par un tour de table de tout ce qu’on ne se dit jamais et notamment une parole gentille à chacun et une qualité que l’on reconnait à chacun …. jusque là, cela fonctionne super bien
Marine, maman de 3 enfantspourvu que ça dure !!
Repérer et accepter les différences de personnalité, de perception
Est-ce que j’accepte de me mettre à la place de l’autre ? Si j’avais été à sa place, comment aurais-je vécu la même incompréhension, le même désaccord ? Qu’aurais-je pensé ? En se souvenant de nos réactions, ne nos ressentis face à nos propres parents, nous avons déjà un premier outil pour mieux comprendre nos enfants, nos ados.

Ai-je raison ? Ai-je tort ? En acceptant les différences de perception, de personnalité, on atténue bien des conflits. Il s’agit de mieux comprendre les enjeux de nos enfants pour mieux adapter notre discours, particulièrement avec des adolescents. Derrière cette discorde de façade se cachent des valeurs qui cherchent à s’exprimer. En gardant votre calme (allez, on essaie….) en leur demandant leur opinion, en demandant de l’expliquer pour mieux comprendre, vous pouvez être surpris d’entendre des raisonnements assez logiques et bien plus fondés qu’on aurait pu le soupçonner.
Ici, avec quatre pirates (16, 14, 12 et 9 ans), les conflits font partie du quotidien !
Florence, maman des 4 piratesIls ont une résolution un peu moins physique que lorsque ils étaient petits mais les noms d’oiseaux et les claquages de portes sont encore fréquents. Lorsqu’ils étaient petits, nous avions le rituel du t-shirt de la réconciliation… quand deux enfants s’étaient disputés et que cette dispute s’était bêtement envenimée parce qu’ils n’avaient pas pris le temps de résoudre le conflit, nous les obligions à porter à deux un seul et même grand t-shirt… Cela les obligeait à composer dans un espace commun (très) restreint et c’était plutôt efficace. Ca finissait quasi systématiquement en câlin de pardon. Mais ça ne marche plus avec des grands…
Avec nos ados, quand il y a besoin d’un tiers pour résoudre le conflit, on propose l’exercice des deux collines. Chacun doit faire l’effort de décrire la situation de son point de vue puis d’aller voir le point de vue de l’autre (les deux collines). Le plus souvent, cette simple reformulation suffit à régler le problème.
Arrêter de vouloir l’égalité à tout prix et préférer l’équité :
Tout le monde n’a pas les mêmes besoins et il serait inadapté de vouloir donner un biberon à tous les enfants de la fratrie sous prétexte que le petit dernier ne peut boire sans. Prendre le temps d’expliciter les besoins de chacun et privilégier le fait de répondre de manière singulière à chacun : un des enfants a besoin de beaucoup de câlins, l’autre a besoin d’écoute, le troisième de pouvoir jouer avec nous, accordons à chacun ce dont il a besoin.
Reformuler simplement, décrire la situation
Plutôt que d’essayer de vouloir tout comprendre, reformulons les demandes faites et décrivons ce que nous voyons, ce que nous avons entendu pour permettre à chacun de prendre un peu de recul. Prenons le temps d’exposer le point de vue de chacun. Parfois les deux points de vue ne sont pas du tout conciliables : Que pensez-vous faire maintenant ?
Crise = croissance et si nos enfants demandaient seulement un peu d’autonomie ?
Nombreux sont les conflits qui viennent d’une inadéquation entre ce que l’enfant voudrait faire seul et ce que le parent imagine qu’il peut prendre (ou pas ) comme risque, décision. Encourageons les enfants, inspirons-leur confiance en leurs capacités par des demandes à leur portée et en leur donnant les moyens nécessaires pour y parvenir. Par exemple pour s’habiller : Prendre le temps de faire une sélection ensemble la veille c’est moins de tracas le matin et ça évite une heure de palabre ! On peut aussi choisir de ne mettre que certains vêtements dans le placard pour éviter de devoir aller à l’école avec un short en plein hiver. Répétons régulièrement que nous avons confiance dans le fait qu’ils trouveront une solution qui convienne à tout le monde tout en restant à leurs côtés pour les encourager et éviter qu’ils n’en viennent aux mains.
Avec des ados, nous pouvons essayer de ne pas (trop) nous inquiéter, de ne pas (trop) leur éviter de souffrance au risque de se mettre entre le monde et eux….même si c’est difficile de lâcher-prise, on ne va pas se mentir !
Plus nous tentons de les protéger de tout et moins nous les protégeons en réalité”
Emmanuelle Piquet, auteur de “Mon ado, ma bataille”, éditions Payot
L’adolescence est une période de construction. Le jeune quitte le monde de l’enfance et se forge peu à peu sa propre personnalité. Il le fait souvent en testant des choses nouvelles, en remettant en question tout ce que font ses parents : idées, valeurs, façon de vivre…autant de sources de conflits potentiels…

Dans cette première partie d’article, nous avons vu ce qu’était un conflit, comment on pouvait se mettre en chemin pour le résoudre, faire un petit pas, changer de regard. Parfois c’est une simple demande d’autonomie que nous, parents, n’arrivons pas à comprendre, à entendre, à accompagner. En prenant le temps de prendre un peu de recul, de regarder le conflit avec les yeux de l’autre, différent de nous, on peut faire un pas de côté et commencer à changer les choses. En comprenant et en faisant comprendre que les besoins des uns et des autres ne sont pas identiques et que ce n’est pas injuste que d’y répondre différemment, on permet à chacun d’avancer dans sa compréhension de l’autre et du monde qui l’entoure. Le conflit, c’est la vie. Etre chacun uniques et donc différents, c’est ce qui fait le sel de la vie, même si ce n’est pas toujours confortable !
La semaine prochaine, nous verrons quelques astuces et quelques points d’attention qui permettent de mieux se comprendre mais également de déjouer quelques crises ! Vous pourrez retrouver également toute une bibliographie pour aller plus loin sur ce sujet.
Gabrielle Sebire, rédactrice pour le Réseau des Parents
1 réflexion au sujet de “Le conflit c’est la vie ?”
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